Anna Kavan : Neige

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« Il était essentiel pour moi de la trouver sans délai. La situation était alarmante, l’atmosphère tendue, la crise imminente. La rumeur courait d’un acte secret d’agression de la part de quelque puissance étrangère, mais personne ne savait au juste ce qui s’était passé. Le gouvernement se refusait à toute déclaration. On m’informa confidentiellement d’une augmentation brutale de la pollution radioactive, laissant supposer l’explosion d’un engin nucléaire, mais de type inconnu et dont les conséquences ne pouvaient être prévues avec précision. Il était possible qu’elle eût entraîné des modifications polaires, lesquelles pourraient provoquer des changements climatiques considérables dus à la réfraction de la chaleur solaire. Si la calotte glaciaire antarctique, en fondant, se répandait dans les océans Atlantique et Pacifique Sud, une grande masse de glace se formerait, réfléchissant les rayons solaires et les renvoyant dans l’espace, privant ainsi la Terre de chaleur. En ville, les bruits les plus confus et les plus contradictoires circulaient. Les nouvelles en provenance de l’étranger étaient censurées, mais on pouvait encore voyager à sa guise. La confusion était aggravée par une vague de nouveaux décrets et par la façon arbitraire dont les réglementations étaient imposées ou levées. La seule chose susceptible de clarifier la situation aurait été de brosser un tableau complet de la situation dans le monde; mais une telle chose était rendue impossible par la décision des politiciens de suspendre la diffusion de toutes les nouvelles provenant de l’étranger. J’avais l’impression qu’ils avaient cédé à la panique, qu’ils ne savaient pas comment faire face au danger et espéraient maintenir la population dans l’ignorance de sa nature exacte jusqu’à l’élaboration d’un plan. »

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